Si vous êtes un éditeur de solution engagé dans des projets liés à la reconnaissance faciale, cette étude du journal “Nature” va vous interpeller.
Si vous êtes simple utilisateur, elle va vous interroger.
Et si vous êtes juste utilisateur d’Internet, d’un réseau, ou même simple quidam se promenant dans la rue, elle va légèrement vous énerver.
Le magazine scientifique Nature suit depuis quelques temps les technologies de reconnaissance faciale, et a publié récemment de nombreux points de vue sur le sujet.
En effet, certains scientifiques s’étaient alarmés des avancés récentes en ce domaine. Pire, ils s’interrogeaient surtout sur la façon dont les recherches étaient réalisées.
Par exemple, une étude scientifique, d’abord publiée, puis dépubliée, portait sur la population musulmane ouïghour en Chine.
Elle semblait donc destinée, ni plus ni moins, à améliorer le “repérage” de citoyens chinois présentant des caractéristiques physiques particulières.
Dans un but qui ne semble rien avoir à faire avec l’éthique.
En conséquence, de nombreux chercheurs ont trouvé inquiétant que des universitaires aient essayé de construire de tels algorithmes. Et qu’une revue américaine ait publié un article de recherche sur le sujet. L’étude de 2018 n’était pas la seule : des revues d’éditeurs tels que Springer Nature, Elsevier et l’Institute of Electrical and Electronics Engineers (IEEE) avaient également publié des articles. Ils décrivaient l’utilisation de la reconnaissance faciale pour identifier les Ouïghours et les membres d’autres groupes chinois minoritaires.
Une étude inédite sur la recherche en reconnaissance faciale
Un nombre croissant de scientifiques exhortent les chercheurs à éviter de travailler avec des entreprises ou des universités liées à des projets contraires à l’éthique.
Ils souhaitent réévaluer la manière dont ils collectent et distribuent les ensembles de données de reconnaissance faciale et à repenser l’éthique de leurs propres études.
Certaines institutions prennent déjà des mesures dans ce sens. Au cours de l’année écoulée, plusieurs revues et une conférence universitaire ont annoncé des contrôles éthiques supplémentaires sur les études.
Voilà pourquoi Nature a interrogé 480 chercheurs du monde entier. ils travaillent dans le domaine de la reconnaissance faciale, de la vision par ordinateur et de l’intelligence artificielle (IA).
Objectif : recueillir leur point de vue sur des questions éthiques épineuses concernant la recherche sur la reconnaissance faciale.
Pour que les algorithmes de reconnaissance faciale fonctionnent correctement, ils doivent être conçus et testés sur de grands ensembles de données d’images.
Idéalement capturés plusieurs fois dans différentes conditions d’éclairage et sous différents angles.
Dans les années 1990 et 2000, les scientifiques ont généralement demandé à des volontaires de poser pour ces photos. Mais la plupart collectent maintenant des images faciales sans demander la permission !
Des photos utilisées sans aucune autorisation
Les plus grands échantillons ont été rassemblés en ligne.
En 2016, des chercheurs de l’Université de Washington à Seattle ont publié une base de données. Appelée MegaFace, elle rassemble plus de 3,3 millions de photos.
Elle est issue du site de partage d’images Flickr. Et des scientifiques de Microsoft Research à Redmond, Washington, ont publié le plus grand ensemble de données au monde, MSCeleb.
Il est lui composé de 10 millions d’images de près de 100 000 personnes, dont des journalistes, des musiciens et des universitaires, extraites d’Internet.
L’artiste berlinois Adam Harvey a créé un site Web appelé MegaPixels qui signale ces ensembles de données.
Au total, il dit avoir cartographié 29 ensembles de données, utilisés dans environ 900 projets de recherche. Les chercheurs utilisent souvent des images Flickr publiques.
Ce simple fait peut créer une disparité concurrentielle. En effet, sur le plan juridique, on ne sait pas si les scientifiques européens peuvent collecter des photos de visages d’individus pour la recherche biométrique sans leur consentement. Le fameux règlement général sur la protection des données (RGPD) de l’Union européenne ne fournit pas de base juridique évidente.
Il n’existe pas de directives officielles sur la façon d’interpréter le RGPD sur ce point, et il n’a pas été testé devant les tribunaux.
Aux États-Unis, certains États affirment qu’il est illégal pour les entreprises commerciales d’utiliser les données biométriques d’une personne sans son consentement;
L’Illinois est unique en permettant aux individus de poursuivre en justice. En conséquence, plusieurs entreprises ont été frappées par des recours collectifs.
Voici un tableau résumant les réponses à l’une des questions du magazine Nature.
Pour en savoir plus :
l’article relatant l’étude du magazine Nature
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