Vous avez tous rêvé d’arriver aux urgences de l’hôpital, et d’être pris en charge rapidement en fonction des données accumulées sur votre pathologie durant toute votre vie ?
Avec des médecins alertés, par exemple, sur vos allergies éventuelles, mais aussi sur la réussite ou non des traitements et actes chirurgicaux précédents ?
On peut penser dans notre société numérisée qu’il en est déjà ainsi, mais ce n’est pas le cas.
Ayant transité la semaine dernière par les urgences pour une pathologie connue et récurrente, j’ai ainsi été amené à discuter avec le chirurgien qui prévoyait 2 opérations successives en anesthésie générale. Après avoir pris connaissance in extremis, de ma bouche, de tous les éléments et antécédents, il a finalement décidé de ne pas opérer.
En discutant avec lui le lendemain, j’ai appris que le dossier médical numérique que je croyais en place n’existait pas vraiment.
Chacun des établissements médicaux où j’avais transité pendant 20 ans conservait en fait une partie de l’information, qui n’était pas échangée ni mise en commun avec les autres.
Voilà qui illustre bien l’une des failles de notre système de santé, même s’il est évident qu’un regroupement des informations médicales sous forme numérique pose aussi des problèmes d’éthique et de sécurité.
Le DMP devient l’espace santé
Le DMP devait régler tout cela, mais ce ne fut pas le cas.
Depuis 2019, date de son lancement, seulement 10 millions d’assurés ont créé leur DMP, et, ce qui est plus gênant, il n’est pas utilisé dans la majorité des cas. Pendant ce temps, l’application TousAntiCovid se rapproche des 38 millions d’utilisateurs, depuis le 2 juin 2020 !
La principale raison de son échec, c’est semble-t-il le manque d’intuitivité, tant du point de vue des assurés, que de celui des professionnels de santé qui n’ont pour la majorité d’entre eux, pas adhéré, car cela représentait une source de perte de temps.
La Dila (Direction de l’information légale et administrative, Premier ministre) précise que « de janvier à mars 2022, si vous êtes affilié à l’Assurance maladie, vous recevrez un courrier ou un courriel vous demandant d’activer votre Espace santé. Vous disposerez alors d’un délai d’un mois pour vous opposer à sa création. Sans réponse de votre part, votre Espace santé sera automatiquement créé. Tous les usagers qui disposaient déjà d’un Dossier médical partagé (DMP) avant le 1er juillet 2021 retrouveront automatiquement leur dossier et leurs données de santé qui y sont stockées dès l’activation de Mon espace santé. ».
Espace santé ?
L’espace numérique de santé numérique intitulé « Mon espace santé » comprendra :
- Une version améliorée du Dossier médical partagé (DMP) pour stocker et partager toutes les donnés de santé : ordonnances, traitements, résultats d’examens, imageries médicales, antécédents médicaux et allergies, comptes-rendus d’hospitalisation, vaccination
- Une messagerie sécurisée pour les échanges entre patients et professionnels de santé
- un agenda santé pour gérer les rendez-vous médicaux et recevoir des rappels pour les dates clés des examens de contrôle (bilans, mammographie, vaccination…)
- un catalogue de services numériques de santé référencés par l’État pour découvrir l’offre des services utiles en santé et gérer les accès à ses données de santé. Les données de santé pourront être rentrées par les professionnels de santé mais également par vous-même.
Qui en est à l’origine ?
Dominique Pon, responsable ministériel au numérique en santé (Ministère des Solidarités et de la Santé) et Thomas Fatôme, directeur général de la Caisse nationale de l’Assurance Maladie, retracent le parcours de ce projet hors norme car pouvant atteindre 73 millions de profils :
« Il y plus de 20 ans, la carte Vitale est apparue en France pour faciliter le remboursement et le suivi des soins.
Ameli est progressivement entré dans notre quotidien. Mais il fallait faire prendre au système de santé français le virage numérique du 21ème siècle, pour d’un côté permettre aux citoyens français d’être acteurs de leur santé, et de l’autre, aux professionnels de santé d’utiliser toujours plus ces outils au bénéfice de leurs patients et simplifier leurs conditions d’exercice au quotidien.
La feuille de route du numérique en santé repose sur la conviction qu’il ne faut pas attendre la femme ou l’homme providentiel, ni le logiciel miracle qui résoudra tous nos problèmes. La solution est de s’engager collectivement, humblement, tous ensemble, pour avancer dans la même direction : donner à la France un numérique en santé digne de ce nom. Très vite, il est apparu, notamment pour éviter que nos données de santé ne soient confiées aux Gafam (ndlr : rappelons que la réalisation du projet a été confiée par la Cnam, après appel d’offres, à Atos Intégration, Atos Infogérance et Octo Technology, une filiale d’Accenture, pour un montant initial de 130 M€), qu’il revenait à la puissance publique d’endosser le rôle de garant de la sécurité et de l’éthique du numérique en santé et par là même, de construire l’espace numérique de santé, que chaque citoyen français pourra utiliser à partir de janvier 2022 : Mon espace santé. »
Si des solutions d’espaces numériques dédiés aux patients sont déjà mises en place par un nombre grandissant d’établissements de santé en France avec l’aide de sociétés expertes, ce qui change en janvier, c’est la nationalisation de la solution et la proposition d’un portail unique.
Laurent Hercé, article rédigé en collaboration avec Ipresse (Ipresse.net)
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